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Le CAN invite l’artiste suisse Martin Widmer pour sa première exposition personnelle d’importance. Ce plasticien hors-norme avait déjà étonné les visiteurs du CAN lors de l’exposition collective Accélération (2007) avec son Tombeau high-tech enregistrant son environnement sonore pour le stocker à jamais. L’exposition Here Comes the Sun présente plus d’une trentaine d’œuvres nouvelles de l’artiste, mêlant séries photographiques, peintures et sculptures dans un espace lui-même traité comme un objet, designé et architecturé tel un fragment issu d’une œuvre totale.
L’exposition reprend le thème de l’apparition qui traverse l’ensemble de son œuvre. Son travail donne à entre-voir des ssures au sein du monde rationnel, des ouvertures vers l’irrationnel dont la recherche réapparait lentement dans le champ de l’art actuel. Ses œuvres sont proposées au spectateur comme autant d’expériences phénoménologiques sensées lui suggérer l’au-delà du rationnel. Ou peut-être faudrait-il y voir des tentatives d’expériences qui cherchent à induire un mouvement vers la transcendance, comprise ici dans le sens kantien, c’est-à-dire ce qui est justement au-delà de toute expérience possible et qui dépasse la possibilité même de connaissance. Les derniers travaux photographiques de Widmer se présentent sous forme de séries, et comme l’écrit Goethe dans Naturwissenschaftliche Schriften, le phénomène pur (Urphänomen) «ne peut jamais être isolé, mais se montre à travers une série continuelle d’apparitions».
Sur un plan formel et historique, Widmer tente une réponse au concept architectural de «supermodernisme» dans le domaine des arts plastiques et de la photographie. Ce concept, développé par l’architecte Hans Ibeling dans une analyse saisissante de l’histoire contemporaine de l’architecture, s’appuie sur la période moderniste pour lui offrir un développement, après s’être débarrassé des travers du postmodernisme. Widmer reprend l’idée d’un certain futurisme et d’un renouveau formel et matérialiste. De fait, ce qu’il retient du modernisme, c’est d’abord un processus d’invention plastique faisant abstraction de la citation, de la référence, du contexte, de la localisation ou de toutes autres justifications, qui ont fait les beaux jours des périodes qui ont précédé et suivi le modernisme.
Cette libération de la situation contextuelle permet à l’artiste de repenser la forme dans son rapport à la notion de projet (ici compris dans son acceptation moderniste qui se veut tournée vers une construction sans autre référence qu’elle-même), tout en réintroduisant les questions de l’irrationnel et de l’au-delà, tranchant ainsi avec les vues positivistes des modernes.
Arthur de Pury
Vernissage le 6 novembre 2009
Exposition du 7 novembre au 18 décembre 2009
CAN Centre d’art Neuchâtel, Here Comes the Sun