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Certaines mauvaises langues ont laissé courir le bruit qu’il s’agirait d’une exposition sur la sodomie.
« Non ! Pas comme ça ! » serait le cri (de surprise, d’appréhension, de déception… ou de plaisir ?) que pourrait lancer la mariée lors de sa nuit de noces. D’autres interprétations circulent. Toutes tentent d’accréditer cette rumeur.
Bien que celle-ci soit totalement infondée, l’idée de sodomie – il faut le confesser – peut éclairer certaines bases sur lesquelles cette exposition se fonde. La sodomie se caractérise en effet par une pratique (active) qui peut certes se révéler douloureuse, mais également jouissive.
Une consommation, sans le romantisme de la (pro)création, de la (re)production.
La pratique de la sodomie est probablement à mettre en parallèle avec le fonctionnement de notre économie occidentale : la production de matières premières est une tâche dévolue au tiers monde ; au monde occidental revient le privilège de gérer, de consommer, et surtout de recycler ce qui est réalisé ailleurs.
Une consommation sans les désavantages et les nuisances de la production.
L’art contemporain reflète parfaitement cette dichotomie : il s’intéresse moins à la création de nouvelles images qu’à la manière de gérer et de recycler ce flot ininterrompu d’informations (visuelles et auditives) dans lequel chacun baigne avec plus ou moins de bonheur.
Mais répétons-le, il ne s’agit pas d’une exposition sur la sodomie.
Non ! Pas comme ça !
Ah bon ! mais alors comment ? Ne comptez pas sur les artistes de cette exposition pour vous l’indiquer. Trop d’expositions à thème, où les oeuvres sont appelées à valider le « propos du jour » et gravitent autour d’un sujet soigneusement commercialisable, consciencieusement branché, pour une identité facilement reconnaissable, digérable. Face à de telles manifestations, comment rendre compte de la pratique artistique actuelle ? Celle-ci revendique en effet le brouillage des codes, l’égarement à travers la jungle de nos signes. Les artistes d’aujourd’hui hantent les chantiers où les glissements de terrain et les catastrophes naturelles semblent chroniques. Promeneurs intrépides, ils plongent dans notre univers quotidien sans trajectoire préétablie. Ils jouent à s’égarer au gré de leurs déambulations. D’où les idées de flux, de rhizomes, de métastases et autres proliférations virales qui caractérisent l’art de cette fin de siècle (opposées aux notions d’identité, de congruence et d’agencement encyclopédique, si représentatives de l’esthétique des années quatre-vingts, où l’artiste devait, pour subsister, défendre une position bien repérable et où les objets, tels des malades contagieux, étaient isolés dans des cellules hermétiques).
L’exposition indique ce qu’il ne faut pas faire, dans le même temps qu’elle montre (donc soutient) ce qu’elle semble dénoncer. Peut-on manipuler ainsi le spectateur ? Peut-on décemment faire dire à l’oeuvre d’art deux, trois, quatre choses à la fois ? Peut-on cautionner une telle exposition ?
Non ! Pas comme ça ! Autoritaire, une telle injonction dénigre systématiquement toute interprétation que l’oeuvre d’art – dans sa nécessaire implémentation – convoque. Les travaux fonctionnent ici comme des passeurs, qui translatent toujours plus loin nos velléités jamais assouvies de fixer l’oeuvre dans un cadre bien délimité. Chaque interprétation s’évanouit ainsi au profit d’une autre, puis d’une autre…
Une consommation sans la tentation de la satisfaction, béate et confortable.
Non ! Pas comme ça ! regroupe une vingtaine d’artistes suisses, français, allemands, hollandais et américains.
Parallèlement à cette importante exposition collective, le CAN organise plusieurs autres manifestations :
VIDÉO
Le jeudi 1l avril à 20.00 heures: compilation ESAV présentée par sa compilatrice Monika Diener. En clair, un choix de productions récentes des ateliers « média-mixte » de l’Ecole supérieure d’art visuel de Genève.
Après avoir brossé une esquisse des tendances actuelles de l’art vidéo grâce au palmarès de la semaine internationale de la vidéo et une conférence de Simon Lamunière (démontrant à quel point l’exercice de l’art vidéo est une pratique instable), nous vous proposons de continuer l’état des lieux, le jeudi 2 mai à 20.00 heures, avec une conférence-présentation de Nicolas Trembley concernant l’édition de bandes vidéos. En effet, depuis quelques années nous avons vu naître un peu partout en Europe des maisons d’édition consacrées à l’art vidéo. Comment fonctionnent-elles ? Quelle est leur approche ? Les réponses à ces questions
contribueront à compléter le tableau électronique que le CAN tente d’esquisser.
CONFÉRENCE
Après le succès rencontré par les interventions des artistes Grégoire Müller et Olivier Mosset, l’AACAN poursuit son cycle de conférences en invitant Antoinette Pitteloud, responsable pour Ecole-Musée du département image du canton de Vaud.
« Les élèves actuels sont les futurs utilisateurs des médias contemporains. Il est donc particulièrement urgent de les initier à un langage plus élaboré que celui auquel ils sont généralement confrontés par le biais de la publicité et de la télévision. Mais pourquoi les enseignants redoutent-il particulièrement la confrontation entre leurs élèves et l’art contemporain ? Pourquoi les musées et centres d’art restent-ils très peu fréquentés par les écoles, même si tout le monde s’accorde sur le rôle de celles-ci dans la diffusion de la culture ? »
Ces problèmes cruciaux seront abordés le jeudi 9 mai à 19.00 heures.
Marc-Olivier Wahler
Vernissage le 29 mars 1996
Exposition du 30 mars au 12 mai 1996
Inez van Lamsweerde, Noritoshi Hirakawa, Piotr Dluzniewski, Philippe Mayaux, Fischli & Weisse, vue de l’exposition NON! Pas Comme Ça!, 1996
Ugo Rondinone, Aziz + Cucher, vue de l’exposition NON! Pas comme ça!, 1996
Vue de l’exposition NON! Pas Comme Ça!, 1996
Vue de l’exposition NON! Pas Comme Ça!, 1996
Vue de l’exposition NON! Pas Comme Ça!, 1996
Vue de l’exposition NON! Pas Comme Ça!, 1996
Claudia di Gallo, Organigramm, 1991
Claudia di Gallo
Claudia di Gallo, Noël Dolla, Piotr Dluzniewski, Philippe Ramette, Urs Aeschbach, Stéphane Steiner, Inez van Lamsweerde, Patrick Everaert, vue de l’exposition NON! Pas Comme Ça!, 1996
Jiri Georg Dokoupil, Claudia di Gallo, Piotr Dluzniewski, vue d’exposition NON! Pas Comme Ça!, 1996
Urs Aeschbach, Sans titre, 1995
Patrick Everaert, Sans titre, 1995, visuel de l’exposition NON! Pas Comme Ça!, 1996
CAN Centre d’art Neuchâtel, NON! Pas Comme Ça!